LE DIABLE DANS LA BIBLE, Découvre l’explication de la pasteure et théologienne Carolina Costa
À Malin, malin et demi
« Dans l’ombre où Dieu se repose, Il [le diable] vint, noir sur l’orient, Et tout au bout du doigt rose [de la femme] Mit un ongle en souriant ». Ainsi se termine le poème de Victor Hugo, « Le doigt de la femme ». Mais que nous dit la Bible sur le diable ? Carolina Costa, non sans pointer dans la vidéo ci-dessus son ongle rose innocent, nous pose une question pointue. De quoi le diable est-il le nom ? Pour répondre à cette question vieille comme la Bible, les théologiens sortent les griffes.
Mal, Malin ou Mauvais
C’est un fait d’expérience : il y a une habitude et une intelligence du mal, une banalité ordinaire du mal, terrifiantes, semblables à l’intelligence et à la méchanceté humaines : il suffit malheureusement de lire le journal ! La théologie doit intégrer les évolutions sociétales et politiques du monde contemporain, mais aussi cette triste réalité, si elle entend survivre et conserver du sens. Comme le recommande le professeur de théologie protestante, François Vouga, « le diable est bien réel en nous. Le situer à l’extérieur revient à ne pas voir nos propres compromissions. Il faut donc prêcher le diable, pour ne pas succomber à la tentation », son autre nom.
La richesse, le pouvoir, la séduction
En toute simplicité, la leçon du récit de la tentation du Christ nous rappelle que pour l’avoir, le pouvoir et la séduction, les gens sont souvent prêts à renoncer à toutes leurs valeurs. Voilà pour l’essence du diabolique. Au-delà des apparences : tout ce qui nous blesse, nous divise et nous déchire est diabolique. Tout ce qui nous accuse, nous rabaisse et nous humilie est satanique.
« Il ne faut donc pas voir le diable partout, mais il faut être lucide. Dans la foi, on a ce devoir de vigilance », constate l’écrivain Antoine Nouis.
Le récit de l’Évangile nous apprend que « le diable peut citer les Écritures pour ses besoins » (William Shakespeare). Mais l’on a beau se demander s’il faut avoir peur du diable, si l’on peut préciser ce qu’il est, une intelligence, semblable à une intelligence humaine, il faut bien reconnaître personnellement qu’il est une capacité de séduction qui nous amène à renoncer à nos valeurs pour assouvir nos désirs dans ces domaines-là, et qu’il a bel et bien cette capacité à nous atteindre.
Faire face au diable avec le Christ, lucidité, lumière
Pour un théologien protestant, « une façon de lutter contre le mal, c’est de le dénoncer, d’en être conscient, de l’appeler par son nom. Quand Jésus est confronté aux démons, ceux-ci lui disent : « Tais-toi, ne nous tourmente pas. » En dénonçant par sa parole cette dynamique du mal, Jésus la stoppe, en arrêtant la fascination qu’elle peut exercer sur nous. Le diabolique, il faut le regarder en face et le dénoncer ». Dieu est capable de tout pour nous arracher aux mains du Malin, mais il faut en passer par ce « code-source ».
« Un des fondements de la spiritualité, poursuit l’auteur, c’est la lucidité, qui consiste à ne mentir ni à soi-même ni à Dieu. Soyons dans notre vérité profonde, et alors nous pourrons voir que le mal existe, que nous n’en sommes pas indemnes et qu’il continue à exercer sa fascination sur nous. Il vaut mieux le savoir, parce que c’est en le sachant qu’on arrive à ne pas se laisser détourner par son intelligence ». Le Mauvais n’aime pas la lumière, il préfère avancer cacher. En m’invitant à prier le Notre Père, je suis conduit par l’enseignement du Christ à le dévoiler. Cette démarche m’oblige à clarifier l’épreuve qui est la mienne, le combat que je dois mener.
Etre délivré du mal
Peut-on en être délivré ? Dieu est capable de tout pour nous arracher aux mains du Malin, mais la foi n’est pas une promenade bucolique, c’est aussi un combat contre le Mauvais. La tradition chrétienne parle du « combat spirituel pour éloigner le mal et sa séduction de notre propre histoire, de notre désir. Et ce combat, c’est à chacun de le mener, on n’en est jamais totalement délivré, mais c’est un combat dans lequel on peut progresser. On peut combattre le mal, on est même appelé à le faire, toute sa vie, parce que ce n’est jamais vraiment terminé ».
Si je prie avec cette confiance, je peux m’appuyer sur la promesse de la première épître aux Corinthiens qui est l’axe majeur du sujet: « Dieu est digne de confiance. Il ne permettra pas que vous soyez mis à l’épreuve au-delà de vos forces ; avec l’épreuve, il ménagera aussi une issue pour que vous puissiez la supporter. » (1 Co 10,13 ; Ep 6,10-18).
Aussi paradoxal que cela paraisse, le combat contre les forces du mal est la paix. Comme l’écrivait le célèbre psychanalyste suisse Carl Gustav Jung: « L’agitation n’est pas une œuvre du démon, c’est le diable lui-même. » Une façon de résister aux puissances spirituelles mauvaise est de vivre dans la lumière et de mettre en lumière ce qui est ténébreux.
PODCAST : Le diable dans la Bible
Textes de David Gonzalez d’après la vidéo de Carolina Costa
Contre les ténèbres de l’auto-critique (diabolique)
« Que vous pensiez que le diable est une véritable entité, les forces humaines du mal ou simplement notre part d’ombre, nous connaissons tous la voix de l’accusateur.
Cette voix de honte dans notre tête, c’est l’accusateur.
Cette voix accusatrice qui me dit que je suis ce que j’ai fait, ou que ce que je suis est mal. L’accusateur est la voix qui me rappelle sans arrêt la distance entre mon moi idéal et mon moi réel, entre ma personnalité idéale et ma personnalité réelle.
Entre mon poids idéal – que je dis que je fais – et mon poids réel.
Ça nous fait dépenser une énergie incroyable pour se prouver qu’on à raison ou tord. L’accusateur va chercher à nous prouver la distance entre notre moi idéal et notre moi réel.
Mais en vérité, personne n’est jamais devenu son moi idéal.
C’est une cible changeante, un mirage au milieu du désert.
Plus il est difficile de l’atteindre, plus nous avons soif.
Mais cela ne nous rapproche pas de l’eau.
Et je ne dis pas que Dieu vous amènera au mirage, je dis que le moi que Dieu aime, le moi qui est en relation avec Dieu, c’est votre moi véritable.
Dieu n’est pas en train d’attendre que vous soyez plus mince, hétérogène, marié, célibataire, plus féminine, moins taré, plus spirituel ou moins alcolo pour pouvoir vous aimer.
J’ajouterai, d’ailleurs, puisque votre moi idéal n’existe pas, par conséquent, la personne que tout le monde aime dans votre vie est aussi votre moi réel. »
Pasteure luthérienne Nadia Bolz-Weber
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Accessible pour une durée limitée:
Carolina Costa
Je suis théologienne, formée à l’Université de Genève, à la faculté autonome de Théologie Protestante (master UNIGE).
J’y ai acquis des compétences historico-critiques et appris le grec et l’hébreu, ce qui me permet de pratiquer mes propres traductions plus contemporaines et accessibles.
J’incarne une théologie réformée progressiste, inclusive, existentielle et joyeuse, en me servant de différents supports comme la vidéo, pour déployer mon énergie et l’Amour contagieux du Christ.
J’écris des livres sur les grandes étapes de la vie et je diffuse chaque semaine des vidéos brèves sur la foi sur les réseaux sociaux.